La feuille blanche est restée accrochée depuis des mois dans la chambre, elle était devenue un souffle, un espace de possibles. Elle s’est chargée progressivement de l’énergie et de l’intime environnants. Elle a veillé sur les mouvements répétés, quotidiens, en a retenu le rythme. Une fenêtre, un écran, solaire, néant, sur lequel se sont imprimer les sensations d’une image qui n’est plus. L’oeil s’est enfoui dans les stries, jusqu’à l’aveuglement. Persistance des flux et des courbes, des dynamiques surgissent. À la surface se confondent les plis des corps et ceux des draps. La lumière a creusé le blanc du papier pour détacher le spectre sensible d’une matière d’image digérée par l’oeil et les sens, devenue molle, élastique, mouvante.
Dans ce travail de dessin à la lame, j’ai voulu expérimenter notre relation physique à certaines images récoltées sur internet, des images de corps. J’ai observé leur temporalité, la consommation rapide de celles-ci en cherchant la matière qu’il pouvait s’en dégager. Par le dessin et le geste d’inciser directement dans le papier, le temps s’est vu rallongé et l’examen très précis, à la recherche de flux invisibles cachés dans les images. Grâce à cette opération délicate et méditative, des motifs ont commencés à surgir, la surface a commencé à se mouvoir.
La peau lisse de l’écran s’est vue se transformer en un relief en mouvement, rendant aux images leur charge sensible et subliminale. Les images sont devenues sculpturales, allant même jusqu’à évoquer d’autres matières comme le plâtre. La vue du sujet n’est plus immédiate, il faut tourner autour pour profiter d’une lumière rasante, d’une inclinaison. Les corps sont devenus des formes aux contours plus troubles qui émergentou se perdent dans le blanc.
PERSISTANCE DES COURBES
Dessin à la lame, papier vinci, 120x80cm, 2020.
Détails - © Simon Whetham - Vue exposition Héliotropes, Atelier Hyph, 2020.